
Aujourd’hui au jardin : une pluie d’escargots
Déconfinement chez les gastéropodes. Pas sûr qu’ils se
sentaient à l’étroit dans ce grand jardin, probablement même qu’ils y
trouvaient de quoi vivre benoîtement : compères et partenaires sexuels, cachettes
de luxe, et salades aux noms évocateurs. La grosse blonde paresseuse et
la lente à monter doivent manifestement ravir ces champions de paresse.
Mais pourquoi autant d’escargots de Bourgogne Helix pomatia dans notre
jardin d’Auvergne ?
Tous les ans, quand se conjugue la douceur d’avril aux pluies printanières,
c’est la ruée vers l’or : ils sortent en masse de leur antre pour aller,
tranquillement certes, mais avec détermination, trouver l’âme sœur et le
végétal tendre. C’est à ce moment, j’imagine, que tous les jardiniers heureux
de vivre en pays calcaire comme moi, doivent contrôler leurs déplacements et
redoubler de vigilance : si l’herbe est haute et le pas pressé, les
escargots succombent, écrasés. Alors voilà : période de chasse ouverte ou
non – parce qu’il en existe bien une pour les escargots, le petit jeu des
matins pluvieux est le suivant : déambuler très tranquillement au jardin,
seau à la main, et les ramasser tous, absolument tous, qu’ils fassent la maille
ou pas – parce qu’il en existe bien une pour les escargots. Plus tard, à
l’occasion d’une sortie à pied ou en voiture, il faudra les relâcher. Et comme
à ce moment, pas plus qu’à un autre, ces messieurs-dames hermaphrodites savent
prendre leur temps, la combine est de planquer le seau dans un fossé, puis
revenir quelques heures plus tard pour récupérer le contenant vide aux parois
gluantes. Ce seau sera alors consacré à l’unique ramassage des mollusques
terrestres.
Pour ces lâchers, nul besoin de parcourir des kilomètres, leur pouvoir de dispersion étant très faible. Leurs migrations n’excédant pas … quatre à six mètres !
Alors pourquoi autant d’escargots ici ? Ils ont besoin de calcium pour constituer leur coquille : nous sommes ici sur une veine de calcaire. Un sol meuble leur permet de s’enfoncer lors de l’hibernation ainsi que pour déposer les œufs ? Bienvenue au jardin paillé plus que de raison, la matière organique favorise une bonne porosité du sol et y maintient l’humidité. Les étés caniculaires sont supportés grâce à une végétation d’herbes hautes et de haie ? Nous avons ça en rayons, aussi !
Pas question toutefois d’expulser l’entière population des lieux. Il faut de tout pour occuper ce vaste espace… de tout, un peu ! Les escargots ont bien leur place, qu’ils soient de Bourgogne, des haies, des jardins ou encore le curieux bouton d’or, petit, plat et discret. Mais comme le ver luisant, prédateur éclairé en ce jardin ne vient pas à bout de la colonie grandissante, le ramassage- relâche reste bien la solution la plus douce pour contrer ces mangeurs de laitues.
j’aime beaucoup le partage de cette philosophie, et la prose est belle aussi